Begec (Serbie)

Ce qui m'aidait à tenir tête aux malins Ilokois, c'était la perspective de dormir ce soir dans un lit vert en Serbie.
Le Danube sépare la Croatie de la Serbie et les postes-frontières sont de chaque côté du pont. Mon passeport est examiné de plus en plus attentivement par des douaniers serbes à têtes de bouchers. Pas de tracasserie, juste un tampon illisible et j'entre en Serbie, accueillie par des panneaux en alphabet cyrillique. Ils sont transcrits en général en alphabet latin, mais pas toujours. En ville (Backa Palancka) les gens sont fermés et pas très souriants.
Je trace la route jusqu'à Begec où j'arrive à la nuit tombante, avec toujours l'angoisse que le gîte n'existe plus ou que les propriétaires soient absents (je n'ai pas leurs coordonnées, juste ce fameux lit vert sur la carte). A la fin du village, je guette attentivement les panneaux sur la gauche (en général un lit) et finis par deviner une minuscule affiche très confidentielle avec une tente et un vélo. Ouf, c'est bien là !
On risque sa vie en traversant la route et là, de l'autre côté du portail, c'est juste le paradis. Une maison en bois avec terrasse, des dépendances parfaitement entretenues, un potager, des arbres fruitiers, 4 chiens noirs, des chats, une oie blanche qui suit ses maîtres partout en faisant ses commentaires. On est en famille, et en plus, les propriétaires parlent français ! On se dit qu'on va passer une soirée mémorable à parler histoire, culture et que sais-je encore. Mais ils en ont sans doute soupé de toutes les questions sur la guerre que se posent les voyageurs venant de Croatie ou d'ailleurs. On m'installe pour dîner (seule et royalement) sur la terrasse. La propriétaire est aux petits soins mais ne s'assoit jamais pour parler. Quant à son mari, je ne l'ai vu que pour me dire bonjour et au revoir. Bon...
Une particularité de la Serbie. Il faut garder dans son passeport une preuve écrite de l'endroit où on a passé sa première nuit dans le pays. Ils ont donc dû courir au poste de police le plus proche à 8h du soir pour me faire établir ce papier.
Après le petit déjeuner, la propriétaire me donne un petit bouquet de menthe à accrocher à mon guidon et me tient le vélo bien droit pendant que je rééquilibre la remorque (à faire au moins une fois par semaine, mais il faut être 2).
Et en route pour Novi Sad !